Précarité du système de santé et de l’approvisionnement en denrées alimentaires
Dans certaines régions, d’autres maladies frappent la population. C’est le cas dans le département de Caquetá, zone de projet d’Action de Carême, où la dengue fait des ravages. Le système de santé, en particulier dans les zones rurales, n’est pas assez solide pour faire face à la pandémie de coronavirus ou aux autres maladies. Le personnel médical, qui manque du matériel le plus élémentaire pour se protéger et ne perçoit plus son salaire, démissionne.
Les mesures économiques prises par le gouvernement profitent principalement aux banques et aux grandes entreprises. L’aide allouée au secteur agricole est destinée en priorité aux exploitations agro-industrielles et seule une infime part est versée aux familles paysannes qui en ont le plus besoin. Le prix des denrées alimentaires a augmenté, alors que parallèlement les agriculteurs et agricultrices peinent à écouler leur production. Les participant·e·s aux projets d’Atucsara, organisation partenaire d’Action de Carême, fournissent à l’Université de Cauca les fruits de leurs chontaduros (pêchers), qu’elles n’ont pas pu vendre. Cette dernière les transforme ensuite en farine, qu’elle distribue aux familles touchées par la pandémie.
Le gouvernement et les entreprises ne tiennent pas compte des droits humains
Pendant l’état d’urgence, de nombreux décrets, qui n’ont pas pu être contrôlés par la société civile, ont été adoptés par le gouvernement. Les permis environnementaux pour les projets d’extraction de matières premières ont été délivrés plus rapidement, par exemple. La population, directement impactée par ces projets, n’a pas eu droit à la parole.
En raison du couvre-feu, le peuple colombien ne peut actuellement pas protester. Le gouvernement en profite donc également pour réintroduire des mesures telles que la pulvérisation aérienne de glyphosate. Lorsque le vent souffle, le désherbant toxique se répand aussi dans les champs avoisinants appartenant à des petits agriculteurs et agricultrices. Cela met en danger non seulement la production alimentaire des familles touchées, mais également leurs revenus.
L’assassinat des militant·e·s se poursuit
Il existe une autre pandémie qui ne reçoit que peu d’attention de la part de l’opinion publique mondiale et contre laquelle le gouvernement ne prend pas non plus de mesures efficaces : l’assassinat de dirigeants politiquement et socialement engagés. Des hommes et des femmes qui élèvent la voix pour défendre leurs droits et ceux de tous les Colombien·ne·s. Des militant·e·s qui ont choisi de protéger la vie et la nature plutôt que des intérêts économiques. Indepaz, l’Institut d’études pour le développement et la paix, rapporte qu’au moins 95 personnes ont été assassinées en Colombie entre le 1er janvier et le 5 mai de cette année. Selon les médias, 19 personnes ont été tuées depuis le 23 mars, malgré le couvre-feu. Le département de Cauca, où travaillent nos organisations partenaires Atucsara, Censat et Semillas de Agua, est le plus touché.
La crise du coronavirus en Colombie a mis en relief une situation qui était déjà problématique avant le début de la pandémie. La majorité de la population colombienne, qui souffrait déjà de violations massives des droits humains, continue d’être confrontée à des défis de taille.
Au 18 mai 2020, 15 574 infections et 574 décès ont été confirmés en Colombie. La courbe semble maintenant s’aplatir.